C’était ici. L’une de ces maisons en briques rouges était leur siège. Un froid glacial envahissait Montréal et la 2ème avenue n’y échapperait pas. De simples escaliers en métal allaient peut-être me mener vers un monde meilleur.
J’attendais Alexandre Meunier, assis sur une chaise, en face du secrétaire qui, de son bureau, me lançait de brefs regards, par-dessus son écran. Dehors, le froid menaçait vainement le double vitrage épaulé par un chauffage redoutable. Meunier vint me chercher en personne. Il me tendait une main sûre d’elle, rassurante et engageante qui, alors que je la lui rendais, n’entama pas mon courage d’aller jusqu’au bout de ma démarche. Un léger sourire épousait son bouc discret. Des lunettes rectangulaires sans monture surplombaient ses joues rebondies et étaient dominées par une chevelure brune courte à peine bouclée. Son amabilité le précéda jusqu’à son bureau, un sobre espace qui mettait en avant l’organisation pour laquelle il était si fier de travailler. One Drop était mondialement connu et reconnu pour ses actions en faveur de l’accès à l’eau et de l’assainissement. Je m’attendais à une introduction un peu classique ; en fait je fus surpris par son entrée en matière, calme et posée.
» – Monsieur Dexet, la multinationale que vous représentez se remet difficilement d’une fin de siècle… Disons mouvementée. Rassurez-vous, malgré cette crise, je ne doute pas de la sincérité de vos intentions, et c’est tout à votre honneur. J’espère d’ailleurs de tout cœur que nous pourrons travailler ensemble. Mais j’émettrai une réserve : à condition que cela ne fasse pas de vagues… Je remarque votre étonnement. Je m’explique : l’éthique est au centre de notre fonctionnement. Ce n’est pas uniquement l’argent que nous recherchons ; ce sont des partenaires engagés et des donateurs sincères. Nous sommes transparents, clairs et limpides. »
(…)
Dans le taxi qui m’emmenait à l’aéroport de Montréal, la radio inondait ses auditeurs d’un flot de paroles dans un anglais impeccable. Des bribes d’un énième débat sur la ressource la plus convoitée de la planète faisaient écho dans ma tête.
(…)
« Le monde assiste aux tribulations d’une Europe asséchée qui peut enfin rivaliser sur un point avec les Etats-Unis et le reste de l’Amérique. Le 21ème siècle n’a pas vu naître les voitures volantes, les villes spatiales et encore moins une atmosphère dé-carbonée… Il s’est même achevé en laissant un défi de taille aux générations futures : une pénurie d’eau douce dans les pays les plus industrialisés. Lors du sommet annuel Water For All qui s’est tenu le mois dernier, des solutions à la pelle ont été envisagées : forage des glaciers d’eau douce ; déplacement de ces glaciers ; dessalement de l’eau de mer ; importation auprès des pays producteurs ; fabrication d’une molécule de synthèse. »
(…)
Janvier 2012
Pour lire cette nouvelle, contactez-moi : nicolas@gutron.fr
0 commentaire